Kolwezi: Devenir riche dans l’artisanat minier à Kasulo, un reve brisé de Daudet Nawej
Depuis plus de trois ans, la partie Est du quartier Kasulo de la ville minière de Kolwezi connait une exploitation artisanale du cobalt. Des habitants du quartier creusent dans leurs parcelles pour extraire le métal noir dans l’espoir de se faire de l’argent et quitter la vie de pauvreté dans laquelle ils se trouvent. Mais pour plusieurs, ce n’est qu’un rêve. C’est le cas de Daudet NAWEJ , 65 ans révolus rencontré au quartier Kasulo
Assis devant sa maison à côté d’un petit étalage de fortune, Monsieur Daudet NAWEJ vend quelques articles dont le haricot, le riz , le savon et le jus. Devant lui est monté une tente de couleur orange, elle couvre le puit d’extraction du cobalt de 32 mètres de profondeur . ‘’ il y a deux ans mes enfants et moi-même ; sommes aussi lancés dans l’exploitation artisanale du cobalt’’, explique Daudet Nawej . Durant la première année, nous avons extrait le minerai qui titrait 3 à 4 % du cobalt mais c’était pour une courte durée. Par la suite, la teneur était très faible, soit en dessous de zéro pourcent. Nous nous sommes découragés et nous avons même recouvert le puit, explique ce fils d’un ancien agent de la Gécamines.
Daudet Nawej a abandonné momentanément l’exploitation du cobalt dans sa parcelle. La faible teneur de ce minerai n’est pas la seule raison. A Kolwezi, les acheteurs qui sont principalement des Chinois sont les seuls maitres du cobalt extrait de façon artisanale. ‘’ Lorsque j’extrais le minerais du puit, je ne peux pas en déterminer la teneur car je ne détiens aucun dispositif pour le faire. C’est avec mes yeux que j’estime la teneur, affirme Daudet Nawej . Et d’ajouter d’un ton triste ‘’ lorsque j’arrive au comptoir d’achat des chinois, ils utilisent un appareil d’évaluation de la teneur du cobalt appelé METOREX et ils vous donnent la teneur selon leur gré. S’ils veulent vous rouler, ils le font car vous n’avez aucun moyen de contre vérification’’.
La teneur du cobalt dans le minerai brut détermine le prix. Un sac de 100 Kg du minerais brut de cobalt qui titre 8% se vend jusqu’à 400 mille francs soit 200 dollars alors que si la teneur de moins 0%, le sac coute parfois moins de 50 dollars.
Un autre problème auquel sont confrontés les creuseurs artisanaux de Kasulo, repose sur le poids du minerai. Là aussi, l’acheteur, un Chinois est le maitre. C’est sa balance et sa seule balance qu’il considère fiable. Ce que Daudet Nawej n’apprécie pas.
‘’ Avant de quitter ma maison, je vérifie toujours à l’aide d’une balance du quartier, le poids des sacs de minerais. Puis je vais livrer au comptoir d’achat situé au quartier Musompo à une dizaine des kilomètres du quartier. Ils pèsent 100Kg, parfois j’ai des sacs de 50 Kg . Mais la surprise c’est que l’acheteur vous dit par exemple que le sac de 100 Kg pèse 60 Kg et baisse le prix. Si j’ose discuter, il me demande sèchement de repartir avec ma marchandise. Mais comment repartir avec ce cobalt, pour en faire quoi ? Je suis donc obligé de céder et de vendre mon produit au teneur et avec le poids décidé par l’acheteur’’.
Après cette mauvaise aventure dans l’exploitation artisanale du cobalt, monsieur Daudet Nawej s’est tourné vers la culture du maïs, une activité qu’il mène depuis plusieurs années déjà. Mais l’argent du cobalt le tente encore. Il y a quelques jours, il a demandé à son fils cadet de 20 ans de rouvrir le puit, parce que présentement , indique-t-il, « les acheteurs du cobalt s’intéressent même au minerai d’une très faible teneur » .
‘’ J’ai appris que les chinois achètent actuellement même le minerais qui titre 0,2 ou 0,3% du cobalt. Voilà pourquoi nous voulons reprendre cette exploitation. La vie est dure malgré que nous sommes assis sur un gisement de minerais qui attire le monde entier. Regarder comment nous croupissons dans la misère’’
Et lorsqu’on lui demande à qui profite finalement ce minerai stratégique, Daudet prend quelques secondes de silence, il soupire
‘’ Ce sont les étrangers, principalement les chinois. Ils achètent le cobalt à moindre cout et vont vendre cher. Ce sont eux qui gagnent et qui prospèrent grâce au cobalt artisanal extrait ici chez nous. Je déplore l’inertie de nos autorités, elles ne nous accompagnent pas. Nous sommes voués à demeurer pauvre malgré la richesse de notre sous-sol’’.
A ce jour, plusieurs puits au quartier Kasulo creusés dans les parcelles sont abandonnés à cause de la rareté du minerais à une teneur acceptable du cobalt.