Gérer l’apogée pour éviter le pourrissement du pouvoir politique

Gérer l’apogée pour éviter le pourrissement du pouvoir politique

Par principe, et considérant le jeu politique, il n’y a pas une formule canonique par laquelle les politiciens et hommes d’Etats accèdent au pouvoir. Par la voix des urnes, coup d’Etat ou par succession, l’essentiel selon les politiciens est de conquérir le pouvoir, l’exercer et le conserver le plus longtemps que possible.  Curieusement, même au cas où les conquérants dudit pouvoir   n’arriveraient pas à gouverner dans l’intérêt du souverain primaire, la tendance, particulièrement en Afrique, est de tout faire pour le conserver.

Dans cette logique, il est conservé de façon confisquée et pour des intérêts égoïstes partagés avec une faction de personnes qui aident le dominant à conserver ce pouvoir. Voilà qui justifie tous les abus du pouvoir.  Et cette manière de gouverner fait le plus souvent oublier aux tenants du pouvoir que celui-ci peut toujours prendre fin d’une manière ou d’une autre : par mandat, coup d’état, indisponibilité ou décès. C’est dire que   quel que soit le temps, tout pouvoir est appelé à vivre son apogée et celui-ci préparant son déclin.  L’histoire politique de l’humanité offre de plus amples informations et d’exemples à ce propos.

Mobutu à son apogée a eu droit à plusieurs surnoms dont « Léopard du Zaïre », « Léopard de Kinshasa », « Aigle de Kawele » (Kawele étant sa résidence située à Gbadolite, à l’intérieur de la forêt équatoriale), « Papa Maréchal » (surnom découlant de son titre de Maréchal), « Roi du Zaïre », « père de la nation », etc. Il a été affublé de tous ces noms pour traduire ses atouts de dominateur.  Son pouvoir a été symbolisé par la toque en peau de léopard et une sorte de couronne bantoue, l’attribut des rois, empereurs ou autres aristocrates. Dans la tradition bantoue, le léopard est considéré comme un animal rusé et sa peau est sacrée.  La canne qui représente la royauté et le pouvoir.

Partant de son nom Mobutu Sese Seko KukuNgbendu Wa Za Banga, c’est-à-dire « Mobutu le guerrier qui va de victoire en victoire sans que personne ne puisse l’arrêter », l’opinion peut se faire une idée sur la grandeur de cet homme et ses ambitions.

Pendant les premières années de son règne, le régime mobutien a été très bien vu sur le plan international, la personnalité affable du maréchal-président et les ressources naturelles du pays aidant. Pendant les cinq premières années, le Zaïre a été considéré comme un exemple pour toute l’Afrique. Les investisseurs étrangers se précipitaient sur les ressources naturelles dont le Zaïre est richement pourvu. Mais quand l’État zaïrois avait lancé sa politique de grands travaux dits les « éléphants blancs », ces projets éléphantesques donneront lieu à une importante corruption des élites politiques et administratives sous Mobutu.  C’étaient des signaux précurseurs de sa décadence et de sa nécrose institutionnelle.

L’histoire politique africaine et du monde nous offre autant d’exemples des régimes qui, puissants au départ, ont fini par s’effriter on dirait des châteaux en cartons.  Les hommes se confondant à leurs formations politiques, le sort des deux a été pareil. Vraiment, il y a des leçons à tirer pour certains politiciens en herbe, mais que le destin ou le hasard a porté certains hommes aux responsabilités d’Etat.

Par expérience, le détenteur du pouvoir politique est toujours tenté d’aller loin de ses prérogatives constitutionnelles et légales.  Des exemples ne manquent pas.  Le désir de gradeur, l’ivresse de lait, l’influence de l’entourage, ses ambitions personnelles, sont entre autres des portent qui   donnent accès à beaucoup de bévues conduisant avec le temps à la nécrose d’un régime.   Le régime de Kabila peut aussi nous interpeller.  Ayant promulgué une constitution au contenu démocratique, le parcours été celui d’un véritable conquérant du pouvoir.

La fête commence toujours dans la joie, et le plus souvent, quand l’ivresse s’empare de quelques-uns, elle est gâchée et elle tourne au vinaigre. Il en est de même de la plupart des régimes politiques. Au départ, tout est enviable, mais la fin devient plus que détestable surtout quand la loi cesse d’être la boussole de toute action politique, le peuple cesse d’être le souverain primaire et le pouvoir devenant de plus en plus un club d’amis du maquis ou » importés » des contrées lointaines.   La nécrose évitable ; c’est possible.  Autrement elle nous rattrape telle la peste.