RDC-réformer le système fiscal : urgence ou éternel débat ?

Dans la République démocratique du Congo, où les revenus de l’État peinent à satisfaire les objectifs de développement, la Banque mondiale émet une nouvelle mise en garde. « Il est nécessaire de procéder à une réforme en profondeur du système fiscal au Congo. » L’étude publiée en juillet 2025 met en évidence que la RDC court le risque de manquer l’opportunité d’une croissance inclusive. Si elle ne change pas sa politique d’imposition.
Malgré que les revenus fiscaux soient plafonnés à 14 % du PIB, la RDC demeure en dessous de la moyenne observée dans les pays de l’Afrique subsaharienne. Dans cette zone, le taux moyen s’élève à 17 %. Le système présente une complexité élevée, une performance faible et une dépendance marquée envers le secteur extractif.
Encore plus alarmant, les divers allègements fiscaux représentent approximativement un tiers des recettes fiscales. Cela représente trois fois le budget alloué à la santé. D’après la Banque mondiale, les réductions fiscales pourraient atteindre jusqu’à 5 % du PIB. Le rapport met en évidence que « le système des dépenses fiscales est coûteux, mal encadré et insuffisamment évalué ». Par exemple, une recherche menée par le GEC a démontré que la RDC a enregistré une perte de 6,3 milliards de dollars en allègement fiscal entre les années 2011 et 2020.
Système fiscal: des exonérations sans contrôle réel
L’institution mondiale observe que les allègements fiscaux relatifs à l’impôt sur les sociétés et la TVA, principalement centrés sur les secteurs minier, industriel et pétrolier, sont fréquemment attribués sans une appréciation scrupuleuse. En outre, ces dépenses fiscales manquent de transparence et ne suivent pas un système d’évaluation coût-bénéfice. « Il n’existe pas de dispositif formel pour évaluer si ces mesures sont efficaces ou même nécessaires », dit la Banque mondiale.
Certaines exonérations sociales, censées bénéficier aux plus vulnérables, ne sont ni chiffrées ni ciblées. Alors que les exonérations fiscales sur certains produits (tels que le carburant ou les boissons alcoolisées) bénéficient principalement aux segments plus fortunés de la société.
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La Banque mondiale plaide pour une centralisation.
Une des recommandations fortes du rapport est la centralisation de la gestion des dépenses fiscales au sein du ministère des Finances. Aujourd’hui, plusieurs institutions interviennent dans l’octroi des exonérations. Ce qui rend le système encore plus opaque et difficile à piloter.
La Banque appelle aussi à uniformiser la TVA. Plutôt que d’avoir des taux réduits profitant aux ménages les plus riches, élargir l’assiette fiscale, et harmoniser les taux d’imposition pour plus d’équité.
Des réformes nécessaires… mais lentes
Malgré quelques avancées, comme l’introduction du système de traçabilité des droits d’accise (STDA) ou la digitalisation partielle de la gestion fiscale, les réformes restent fragmentaires. Le manque de capacités techniques et l’absence de volonté politique freinent le processus. « La Banque mondiale souligne que la RDC ne peut étendre son espace budgétaire sans réorganiser ses exonérations fiscales. »
Fiscalité juste : un levier pour le développement
La fiscalité reste l’un des leviers les plus puissants. Ces moyens peuvent assurer un financement durable des services sociaux, diminuer les disparités et encourager une croissance inclusive. Pour cela, la RDC doit sortir du cycle des « réformes annoncées, jamais consolidées« .
La question n’est donc plus de savoir si une réforme est nécessaire, mais quand elle sera sérieusement engagée. Et surtout : à quel prix le pays peut-il encore se permettre d’ignorer cela ? Parce que le système fiscal une fois réformé peut booster le développement.