Haut-Katanga- arrangement à l’amiable autour des cas de viols: une forme de corruption

Haut-Katanga- arrangement à l’amiable autour des cas de viols: une forme de corruption

Le nombre des cas des violences sexuelles est en hausse au Haut-Katanga. Quant aux auteurs, ils sont persuadés qu’après leur forfait,  ils obtiendront forcément un arrangement à l’amiable  qui est l’un des moyens contraignant injustement les victimes au silence. Ils sont prêts à récidiver. Entre autres témoignages, droits de l’homme et avis des experts, l’arrangement à l’amiable  constitue une  forme de corruption à bannir dans les dossiers des viols sur mineures.

Elodie*, 17 ans, est une des victimes de viol. Elle était en quatrième secondaire lorsqu’un douanier de 59 ans l’avait engrossée. «Il s’est présenté dans ma famille comme auteur de la grossesse et a présenté des excuses aux parents, promettant de me prendre comme sa seconde épouse», raconte, timide, la jeune fille aujourd’hui mère.

Choqués au départ, les parents ont fini par accepter. «Nous pouvions bien saisir la justice, mais pour  voir le violeur arrêté aujourd’hui et libéré demain», s’indigne  la mère d’Elodie. Cette pauvre mère s’est contentée de deux chèvres et d’autres objets comme des pagnes, foulards, chaussures et casseroles offerts par le « bourreau » de sa fille. Ces objets ne constituent pas la dot proprement dite et d’autres effets donnés au père.

Mais aujourd’hui, le douanier multiplie des faux fuyants pour ne plus épouser la jeune fille. D’abord, il trouve qu’Elodie a l’âge de ses propres filles et ce serait donc une honte pour lui de l’épouser. Ensuite, sa femme s’oppose vigoureusement à ce mariage.

De son côté, Esther*, 16 ans, habite à la Rwashi, une des sept communes de la ville de Lubumbashi. Elle a été engrossée par un cadre d’une entreprise minière. Pour éviter 20 ans de prison et en vue d’étouffer l’affaire qui risquait de lui faire perdre son emploi, le « bourreau » a offert l’une de ses maisons à la famille de la fille sous la médiation du chef de quartier qui en a malhonnêtement tiré, lui aussi, quelques profits.

Les arrangements à l’amiable, une atteinte aux droits de l’homme

En RDC, le viol sur mineur est puni entre “sept et vingt ans de servitude pénale principale et d’une amende de 800.000 (huit cent mille) à 1.000.000 (un million de francs congolais). Cette peine peut même être doublée si le viol est fait par des agents publics, des ministres de culte qui ont abusé de leur position pour le commettre, du personnel médical, paramédical ou des assistants sociaux, des tradi-praticiens envers les enfants confiés à leurs soins.” Dispose  la Loi n° 06/018 du 20 juillet 2006 modifiant et complétant le Décret du 30 janvier 1940 portant Code pénal congolais en ses articles 167-171 bis.

Chris Shematsi, Avocat et expert en droit constitutionnel s’exprime a ses propos: « Les arrangements à l’amiables sont contraires à la loi en ce qui concerne les violences sexuelles. Les autorités judiciaires (magistrats du parquet) sont tenus de poursuivre l’auteur présumé de l’infraction lorsqu’il existe des indices sérieux de culpabilité ».

Selon la loi, les arrangements à l’amiable désignent « le fait de négocier un compromis entre les parties à un litige, dans le but d’éviter un procès. Ils peuvent être utilisés pour régler tout litige civil, d’ordre familial, patrimonial ou professionnel ». Normalement, une convention écrite doit être signée une fois l’accord trouvé. Explique Maître  Hubert Tshiswaka avocat et directeur de l’Institut de recherche en droits humains(IRDH).

Au sujet du viol, cela désigne le fait que « le bourreau ou l’auteur de viols use de ses moyens en argent ou en matériel, en échange contre le silence ou l’abandon d’une poursuite judiciaire de la part de la victime ou de sa famille ».

Pour sa part,  l’avocat Théophile Kazadi, conseiller juridique à l’ONG locale Initiatives communautaires pour le bien-être social, affirme qu’on ne peut pas réussir efficacement la lutte contre les violences faites aux femmes sans guérir au préalable le système judiciaire de ses deux maux chroniques qui sont la corruption et le trafic d’influence. Maître Kazadi propose de sanctionner tous les membres du corps judiciaire qui se rendraient coupables de corruption et qui cèderaient à l’influence, notamment des politiciens.

Les viols étant souvent commis en famille, ce qui fait que les membres des familles estiment parfois que l’on ne doit pas traîner l’un de leurs derrière les barreaux, que la victime ne devrait pas faire la honte de la famille, aussi parce que le viol en RDC n’est pas encore considéré comme un acte criminel. Certaines personnes estiment que la justice ne saurait pas rendre le droit, que les «bourreaux » ont souvent beaucoup plus de moyens que ces familles”. Et pourtant, la loi congolaise prévoit que “le juge prononcera en outre la déchéance de l’autorité parentale ou tutélaire si l’infraction a été commise par une  personne exerçant cette autorité » conformément à l’article 319 du “ Code de la famille ”.

Les arrangements à l’amiable en cas de viols, constituent également une corruption. Une corruption dans l’achat de la conscience des personnes et le silence des victimes, minimisant ainsi, les droits de l’homme et bien plus « les droits des enfants ». Car, dans la plupart des cas, ces arrangements sont faits sans leur « accord au préalable ».