Journée mondiale de la menstruation: les règles, un calvaire pour les adolescentes à Lubumbashi.
A Lubumbashi avoir ses règles, reste une source d’angoisse pour la plupart des jeunes filles adolescentes. 83 % se disent stressées en classe à cette période, selon une étude réalisée par l’Unicef. Toujours selon le Fonds des Nations unies pour l’enfance, 21 % manqueraient régulièrement les cours, de nombreux établissements scolaires ne disposant toujours pas de latrines, d’eau potable et de savon. Alors, la plupart préfèrent rentrer se changer chez elle, quitte à parcourir plusieurs kilomètres parfois.
Adolescente, Magalie Kilapi vivait ses règles comme un calvaire. Aujourd’hui, âgée de 43 ans, elle se rappelle encore des de douleur qui la pliaient en deux, de la peur des moqueries de ses camarades de classe, ou encore de plusieurs fois qu’elle a manqué les cours à l’école suite à ses règles.
« Je manquais souvent l’école ces jours-là, j’avais honte, je vivais mes menstruations comme un handicap », confie celle qui, comme beaucoup de jeunes Lushoise, commencera par utiliser des bouts de tissu comme protection. « Je ne savais pas comment faire, je n’osais pas en parler à ma famille », relate-t-elle assise à son bureau, dans sa robe colorée en fleurie. Si, aujourd’hui, Magalie préfère oublier ces « souvenirs difficiles », un rêve ne l’a plus quittée depuis. Celui « d’aider les petites filles pour qu’elles n’aient pas à souffrir à leur tour de leurs règles ».
Au sein des foyers, le sujet des menstruations est encore tabou, contraignant certaines à se débrouiller seules à l’arrivée de leurs premiers cycles. « J’ai entendu tellement d’histoires, des filles qui utilisent des bouts de matelas en mousse, des papiers journaux ou même du coton hydrophile », rapporte encore Magalie. Alors, il y a un an, elle a décidé de lancer Mon corp, une serviette hygiénique qui ne se jette pas, une marque de protections périodiques lavables en tissu.
Un sujet tabou
Les règles restent un sujet dont on parle peu dans la sphère familiale à Lubumbashi. Or, mettre des mots sur un tabou permet de réduire les risques, potentiellement dévastateurs, liés à l’ignorance et aux fantasmes. Des adolescentes affirment avoir affronté ses moments seuls sans l’aide des proches et parents.
Melissa* a 13 ans. Elle se souvient de la nuit qui a précédé ses premières règles. « Je dormais à côté de ma mère lorsque j’ai ressenti de violentes crampes à l’estomac. Je ne savais pas ce qui m’arrivait. J’ai cru que j’étais malade. Ma mère m’a mis un linge froid sur le ventre pour soulager la douleur, mais celle-ci était intolérable. Je n’ai quasiment pas dormi. Le lendemain matin, je me suis sentie un peu mieux et j’ai pris une douche avant d’aller à l’école. Dans la salle de bains, j’ai vu le sang s’écouler de mon corps sur le sol. J’étais perdue. J’ai couru à la maison et j’en ai parlé à ma mère. Elle m’a demandé de m’habiller pour m’emmener à l’hôpital. Elle pensait que je n’étais pas bien et elle m’a donné des linges supplémentaires afin que le sang ne tache pas mes vêtements. Nous sommes allées à la clinique voir un docteur. Après m’avoir examinée, il nous a annoncé que j’avais mes règles et que c’était tout à fait normal. Il a expliqué à ma mère qu’elle devait acheter des serviettes hygiéniques et m’a donné des conseils d’utilisation et d’hygiène pendant la menstruation. Il m’a aussi dit que j’aurais mes règles tous les 28 jours. Ce jour-là, j’ai manqué l’école parce que j’avais très mal mais aussi parce que nous avons passé beaucoup de temps à l’hôpital ».
« »Comme le docteur l’avait prédit, mes règles sont revenues tous les 28 jours. À cause de la crise économique, il m’arrivait de rater l’école car ma mère n’avait pas de quoi acheter des protections hygiéniques. L’an dernier, l’UNICEF a commencé à distribuer des serviettes et du savon, des culottes et un fil à linge que les filles peuvent utiliser pendant leurs règles. Cela a provoqué un profond changement car, depuis, je n’ai pas manqué une seule fois l’école à cause de mes règles » ».
A Lubumbashi, beaucoup de filles ne vont plus en classe lorsqu’elles commencent à avoir leurs règles car leurs parents ne peuvent pas leur acheter de serviettes hygiéniques. La nourriture est une priorité, et des produits comme les serviettes sont considérées comme un luxe dans la plupart des foyers
« »J’aimerais que davantage de parents accompagnent leurs enfants, en particulier les filles, en leur parlant de la menstruation pour les préparer à ce qui va leur arriver » ». Affirme Dcoteur richard Gynecologue
Merveille 14 ans a failli abandonner l’école l’annee passee a cause de ses regles. Elle affirme avoir eu beaucoup de mal à parler de menstruation avec son père qui s’occupe d’elle depuis le décès de sa mère, il y a quelques années. « Il m’aide de son mieux, mais il a souvent du mal à m’acheter des serviettes hygiéniques. Auparavant, je manquais quatre à cinq jours d’école par mois. À un moment, j’ai failli décrocher complètement ».
Les cours dispensés à l’école contribuent à faire reculer la stigmatisation dont les filles sont victimes. Désormais, garçons et filles comprennent que les règles sont tout à fait normales. C’est une bonne chose car les filles n’ont plus à craindre qu’on se moque d’elles à l’école. Par ailleurs, les toilettes des établissements scolaires doivent être propres pour protéger l’intimité féminine.