RDC: suspension de 12 partis politiques, les réactions se multiplient

RDC: suspension de 12 partis politiques, les réactions se multiplient

Lors de son analyse sur la suspension de 12 partis politiques, effectuée ce lundi 3 novembre 2025 à Lubumbashi, Hubert Tshiswaka, directeur de l’Institut de recherche en droits humains (IRDH), a conclu que la politique suit une logique différente de celle du droit. Cette conclusion intervient après l’annonce du ministre de l’Intérieur, Jacquemain Shabani, du 31 octobre dernier, suspendant ces partis de l’opposition. Parmi les partis concernés figurent le PPRD de Joseph Kabila, le LGD de Matata Ponyo ainsi que PISTE pour l’Émergence de Seth Kikuni.

Ces formations politiques sont accusées d’entretenir des liens avec l’ex-président Joseph Kabila, notamment en participant à la création de la plateforme « Sauvons la RDC ». Selon le ministre de l’Intérieur, leurs actions violent les principes d’unité nationale, de souveraineté et d’intégrité territoriale de l’État.

Une analyse juridique : le respect de la Constitution

 

Sur le plan juridique, Hubert Tshiswaka rappelle que l’article 6, alinéa 3, de la Constitution congolaise reconnaît le pluralisme politique. En vertu de cette disposition, les partis doivent respecter les principes démocratiques, l’unité et la souveraineté nationales. D’après l’analyse du directeur de l’IRDH, le ministre de l’Intérieur peut légitimement suspendre ces partis politiques, si leurs actions semblent constituer une violation de la Constitution, notamment en participant à des activités jugées subversives, voire en entretenant des relations avec des groupes rebelles.

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La logique politique : un contraste évident avec la loi

Toutefois, le contexte politique actuel nuance cette approche. En effet, le gouvernement congolais, auquel appartient Jacquemain Shabani, mène actuellement un dialogue avec les groupes rebelles. En d’autres termes, un régime qui négocie avec des forces rebelles occupant une partie du pays pourrait aussi envisager de dialoguer avec les partis politiques accusés d’être en lien avec l’AFC/M23. Hubert Tshiswaka souligne ici une contradiction. « Il y a une nuance. En droit, oui, le ministre a raison de suspendre ces partis, car la loi exige le respect de l’ordre public et de l’intégrité territoriale. Mais politiquement, le gouvernement dialogue avec les rebelles, ce qui ouvre la voie à des discussions politiques avec les partis accusés de collusion. »

Dans cette optique, le ministre de l’Intérieur aurait pu prendre une autre direction en matière de gestion de cette crise politique. Car le dialogue semble essentiel dans le contexte actuel.

Risque de dissolution des partis politiques

Le ministre de l’Intérieur a par ailleurs annoncé avoir saisi le Conseil d’État, afin d’obtenir la dissolution des partis suspendus. D’après Hubert Tshiswaka, cette démarche est conforme à la loi sur l’organisation et le fonctionnement des partis politiques. Car celui-ci impose au ministre de saisir le Conseil d’État pour qu’il examine les raisons de la suspension. La procédure prévoit en effet qu’une décision judiciaire soit rendue, et non uniquement un arrêté ministériel. « Il faut une décision de justice, pas seulement un arrêté du ministre », précise l’expert.

Si le Conseil d’État valide les accusations portées contre ces partis, la dissolution pourrait être prononcée. Dans ce cas, « très probablement, la décision du Conseil d’État serait la dissolution de ces partis. Car ces derniers semblent s’ouvrir à la rébellion », explique Hubert Tshiswaka. La situation actuelle, marquée par une forte tension politique, exige d’être résolue plus sur le terrain politique que sur celui du droit, indique-t-il encore.

Jean-Claude Katende : une dénonciation vigoureuse

 

Jean-Claude Katende, de son côté, a fermement dénoncé la mesure prise par le ministre de l’Intérieur. Sur son compte X, il a alerté sur les conséquences potentielles de cette décision. « Je dénonce la stratégie du régime Tshisekedi visant à asphyxier les partis d’opposition, en les privant de tout espace démocratique. Cette situation pourrait les pousser à agir dans la clandestinité, recourant à des moyens illégaux pour résister et accéder au pouvoir. »