RDC: le Lithium de Manono au cœur des conflits entre investisseurs

RDC: le Lithium de Manono au cœur des conflits entre investisseurs

Ressource Matters craint et alerte sur des tendances dangereuses de corruption sur le gisement de lithium congolais. Dans un document intitulé Drapeau rouge, l’ONG illustre les batailles entre les entreprises sur les droits d’acquisition des droits miniers du lithium à Manono en RDC. Cette cité détient l’un des plus grands gisements de lithium en roche dure inexploités au monde.

En effet, l’exploitation du lithium de Manono constitue une opportunité majeure pour les entreprises. Mais aussi pour les communautés locales de Manono qui espèrent se développer. La RDC pourrait donc tirer profit du gisement exceptionnellement riche en un minerai très recherché à l’échelle mondiale.

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La bataille d’acquisition des permis

Cependant, obtenir et conserver un permis d’exploration s’est révélé particulièrement difficile. C’est encore plus difficile d’obtenir un permis d’exploitation. L’histoire du gisement de lithium est marquée par des changements brusques de propriété au sein de coentreprises qui se sont succédé. Ce qui fait planer des soupçons de corruption et de longues batailles juridiques entre investisseurs. Des pratiques des marchés obscurs continuent de créer des conflits entre neuf entreprises à Manono au sujet du lithium.

C’est, par exemple, Dathcom Mining, une joint-venture initialement créée par la Cominière. Cette dernière occupe (30 %) et son partenaire Dathomir Mining (70 %) pour rechercher et exploiter le lithium dans le permis 13359 couvrant le gisement de Manono-Kitotolo. Plus tard, la joint-venture fut rejointe par deux autres sociétés. Il s’agit d’AVZ Minerals à fin 2016 et de Jinxiang Lithium (une filiale de Zijin) en 2021. En 2023, à la suite de divergences entre AVZ, qui était l’actionnaire majoritaire, et la société publique Cominière, Dathcom Mining fut dissoute unilatéralement par la Cominière.

Ce conflit fait actuellement l’objet d’un arbitrage international opposant la société Cominière et l’australienne AVZ. Cette dernière avait perdu sa licence en 2023, en faveur de la société d’État Cominière. Celle-ci reste, selon le Cadastre minier, à en être le propriétaire exclusif. Cependant, AVZ a vigoureusement contesté cette décision de l’État congolais. C’est dans ce contexte qu’AVZ se trouve devant le tribunal de la Chambre de commerce internationale. Lequel a récemment condamné la partie congolaise.

Une invitée surprise

Bien que le litige reste toujours en cours dans le cadre du conflit opposant la Cominière à AVZ, le deal de l’accord de paix entre le Rwanda et la RDC aux USA a fait venir dans ce conflit la société américaine Kobold Metals sur la piste du conflit.

Resources Matters constate le non-respect des lois et des procédures pour favoriser des entreprises politiquement connectées. L’ONG dénonce également les pratiques telles que l’absence de concurrence loyale qui en résulte, le recours à des sociétés écrans pour détourner des fonds et les rendre intraçables. Elle déplore aussi des interventions intermédiaires proches de l’élite politique.  Ces pratiques enrichissent des individus au détriment des communautés locales.

Ce scénario bien connu a déjà causé de graves préjudices au pays. Fermer les yeux sur les signes croissants d’opacité et de corruption reviendrait à reproduire les mêmes tendances qui ont déjà ravagé la RDC dans l’industrie du cobalt et du cuivre”, indique Ressources Mater.

Par ailleurs, Resources Matter alerte en accusant en même temps la Cominière, société de l’État à la base des conflits. La Cominière a successivement constitué et dissous plusieurs coentreprises. C’est le cas de MMCS, ensuite remplacée par Dathomir et AVZ, puis par Zijin. Les procédures et les raisons de ces dissolutions restent floues.

La RDC pourrait de nouveau se retrouver à l’avant-garde d’un marché minier critique. Un marché essentiel à l’économie mondiale en raison de l’utilisation du lithium dans la fabrication de batteries. Avec la montée des véhicules rechargeables, la RDC s’affirme comme pays solution à la transition énergétique.