Préserver la foret , entre vivre et mourir au village Katanga
Ce samedi 11 juin 2022, le roi Phillipe des Belges, était au village Katanga, situé à près de 100 kilomètres de Lubumbashi. Son pays y soutient, à travers la FAO, un programme de préservation et de reboisement de la foret du Myombo au village Katanga. Les villageois, visiblement émus par cette visite, ont accueilli le roi Phillipe avec chants et danses. Mais derrière les sourires et la joie manifeste, se cachent des rancœurs et une déception. Ceux-ci , sont exprimés juste après son départ.
Ce programme est présenté dans tous les rapports officiels comme exemplaire. Car il permet la renaissance de cette foret . Celle-ci courait vers une fin inexorable. Les responsables du comité de développement et de surveillance citent en exemple le retour des chenilles et les champignons. Des insectes et des plantes qui apparaissent à des endroits où ils avaient disparu. Les plantent médicinales de plus en plus visibles ,épargnent aux villageois de recourir aux produits pharmaceutiques. Car ces derniers sont hors de portée de leur maigre bourse .
À lire aussi: L’écologie s’invite dans l’agenda de roi des Belges au Katanga
Attention à l’impuissance sexuelle
Le comité de développement assure faire aussi de la pédagogie. Il apprend aux villageois, comment utiliser un arbre à des fins curatives ou préventives, sans toucher aux racines pour éviter de le faire dépérir . Les plus vieux et les sages en profitent pour apprendre aux adolescents , à se tenir loin de l’arbre appelé en langue locale « Mofwe » et de ne jamais le couper . Faute de quoi ,ils risquent une impuissance sexuelle. Ou encore risquent d’avoir de terribles mal de dos ,ce qui revient au même. Le comité montre aussi avec fierté la pépinière où germent plusieurs essences dont certaines étaient en voie de disparition.
Si tout semble bien aller comme dans le meilleur des mondes, ainsi que le montraient les accolades et les congratulations, côté jardin la déception est grande. « On nous dit de préserver la foret pour que le monde entier respire bien, mais nous-mêmes mourrons de faim . Nos enfants sont chassés de l’école » ,murmure un paysan. Un autre enchaine, « nous tous dans le village, nous sommes des agriculteurs ,mais le gouvernement provincial du Haut Katanga ne nous inclut pas dans les villages agricoles. Nous ne sommes pas subventionnés en intrants et en semence comme certains villages ,renchérit un autre.
L’électrification , un atout ?
Barthelemy Lutumba préfet de l’institut Anuarite du village Katanga et membre du comité de développement se félicite pour la visite du roi et du programme de préservation de la foret. Il souhaite toutefois que l’électrification, promise par le gouvernement provincial, soit effective . Ceci, pour éviter que les villageois ne fassent pas trop de pression sur la foret. Car ici, c’est le bois de chauffe est la seule énergie que dispose le village . Il indique que le gouverneur du Haut Katanga a déjà lancé un projet de desserte en courant électrique pour le village. Quelques poteaux sont déjà placés ,mais la concrétisation tarde à venir.
Les terres saturées
Pour ce qui est de l’agriculture ,ce membre du comité affirme que les terres sont aujourd’hui polluées et ne produisent presque rien pour le moment. Il fustige le fait que les entreprises minières environnantes n’engagent pas les villageois. Mais prennent quelques journaliers pour une rémunération mensuelle de misère. Cette rémunération n’excède pas 50 dollars par mois. Il craint que sans revenus substantiels et à cause de la pauvreté, « les villageois » se remettent à couper en masse du bois ,comme auparavant. Selon lui, il y a d’ailleurs de plus en plus des alertes. Mais ils ont du mal à intervenir faute de moyens de locomotion.
« La foret que nous protégeons est à 12 kilomètres du village. Nous y allons à pied pour intervenir. Le temps que nous arrivions, les délinquants sont déjà partis. En plus, nous ne sommes pas payés pour ce travail. Nous ne sommes même pas capables d’acheter un vélo avec nos moyens propres », déplore-t-il.
Un membre de la cour du chef de groupement, qui a requis l’anonymat, pense que sans alternative sérieuse, ce programme qui est pourtant nécessaire, s’effondre dans un proche avenir. Et ,faute de bonne volonté de la part des gouvernants .