Croisette du Katanga : Une technique ancestrale toujours présente
Depuis plus d’un siècle, le village Walemba à près de 30 Km de la ville de Kolwezi sauvegarde une technique ancestrale de la fonte du cuivre. C’est la production de la croisette à l’aide d’un four traditionnel. Ce savoir-faire se transmet de génération en génération autour de 43 familles appelées les Mangeurs du cuivre. Ceux -ci proviennent du peuple Basanga.
En effet, les fouilles archéologiques autour du site de l’exploitation minière de l’entreprise Kamoa montrent que dans cette région les populations ont travaillé le cuivre depuis des siècles. En plus des différents outils usuels, la croisette est symbolique pour les Basanga. La forme de la croix revêt tout son sens, explique le professeur Jacques Kasweshi, secrétaire académique de l’université de Likasi et membre de la communauté Sanga.
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Le Disanga, le pays des Basanga, vient du verbe Kusanga, qui signifie mettre ensemble, se rencontrer. Les différentes parties représentent les quatre points cardinaux . Les gens viennent des différents coins du monde et se rencontrent ici, au centre. Le centre, c’est le Disanga. Parce qu’au commencement, c’était un espace bien giboyeux, poissonneux, mais il y a aussi le métal qui les attire . Ainsi , la croisette c’est le symbole de toutes les races qui viennent des différents coins, pour exploiter du cuivre.
Mangeur du cuivre
Par ailleurs, les fondeurs du cuivre au village Walemba sont qualifiés comme de Mangeurs du cuivre. Ce n’est pas anodin , explique encore le professeur Jacques Kasweshi.
La croisette, c’est ce que nous appelons en Kisanga, Muambo. Il faut mettre ce mot cela en relation avec le verbe manger. Ces fondeurs disaient « tu yei, tu kadi, mukuba » Allons manger le cuivre. Le cuivre , mieux la croisette devient le symbole de la vie. Celui qui mange le cuivre, il a la vie sur la dimension des richesses, sur la dimension de la force, sur la dimension de la guerre. Parce qu’avec tout ça, il va fabriquer des armes. Donc, manger le cuivre devient le symbole de la vie. La vie sur toutes ses dimensions. C’est pourquoi on les appelle mangeurs du cuivre. Quelqu’un qui ne mange pas, n’a pas de vie. Et le Musanga, au lieu de manger, le fufu, c’est-à-dire cela, lui, il va manger le cuivre.
Croisette….. Des communautés expropriées ?
Pour sa part, Katanika Bijoux, un descendant de M’siri soutient également que les communautés du Sud Katanga connaissaient leurs ressources minières. Et cela, bien avant l’arrivée dans la région des explorateurs d’bord et par la suite, celle des colonisateurs. Mais ces communautés ont tout simplement été expropriées de leur richesse. Aujourd’hui, ce sont les plus pauvres parmi les pauvres , regrette-t-il.
La croisette pour moi, c’est une preuve qui montre que le cuivre a ses propriétaires. Ce sont entre autres les Basanga, les Balamba et les Babemba. Toutefois, le problème s’est posé lors du transfert de propriété. C’était une expropriation pure est simple.
Cet assistant à l’université de Likasi accusent les Belges . D’après lui, en créant l’union minière du Haut Katanga, actuelle Gécamines , les Belges ont occupé tout les sites miniers
Les colonisateurs qui sont arrivés, ils ont exproprié les communautés de leurs terres . Ils ont déclaré que tous les gisements du cuivre appartiennent désormais à l’Union minière. Mais ça appartenait aux gens, même s’ils n’ont pas eu des documents, ils n’ont pas écrit. Chacun savait que ici c’est ma carrière.
Et d’ajouter , vous amenez une nouvelle technologie mais vous négociez avec le propriétaire. De ce fait , le propriétaire aura sa part et vous, vous aurez votre part. Mais ce qu’on a fait, c’est un crime économique contre la population qui était propriétaire du cuivre. Et on l’ a forcée à seulement s’occuper de l’agriculture. Ce qui n’est pas dans ses habitudes.
Malgré la présence dans la région du Katanga des multinationales , la fonderie traditionnelle du cuivre appelée Lwanzo lwa Mikuba survie à tous les coups. La dynastie des initiés à cette métallurgie est toujours présente au village Walemba . Aussi la technique ancestrale de production reste vivante. Ce qui pour des acteurs culturels, constitue un patrimoine commun.