RDC-DOT : entre minoration du chiffre d’affaires et paiement partiel

En République démocratique du Congo, la loi minière oblige les entreprises du secteur à payer une dotation aux communautés impactées par leur projet. Cette dotation est l’équivalent de 0,3 % de leur chiffre d’affaires annuel. Cependant, un rapport d’audit de la Cour des comptes démontre que 95 % des entreprises minorent leur chiffre d’affaires pour payer moins aux communautés. De plus, certaines ne paient pas la totalité de la dotation.
Ce rapport porte sur quarante-quatre organismes spécialisés. Selon la Cour des comptes, seules deux entreprises sur les quarante-quatre concernées ont fait des déclarations exactes de leur chiffre d’affaires. Certains n’ont même pas communiqué leur chiffre d’affaires aux organismes.
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Minoration et paiement partiel
Selon le rapport de la Cour des comptes, trente-sept d’entre elles ont minoré leur chiffre d’affaires. Entre leur déclaration du chiffre d’affaires des entreprises faite à la direction générale des impôts (DGI) et celles faites aux organismes spécialisés, il y a un gap de plus de 16 milliards de dollars.
Cette situation occasionne un manque à gagner au titre de la dotation. Les 16 milliards non déclarés auraient apporté à la dot plus de 50 millions de dollars américains. Sur l’ensemble de dotation attendue de 42 entreprises, il se dégage également un écart de 97 millions.

« Il se pose un réel problème de transparence », a dit Jean-Pierre Okenda, expert en questions minières. « Le problème se pose au niveau de la divulgation des informations sur le chiffre d’affaires. C’est complexe », dit-il encore. Pour lui, « il faut accroître le contrôle opérationnel. De plus, il faut demander la publication des chiffres d’affaires. Car, les organismes qui gèrent la DOT n’ont pas accès aux informations. Il faut avancer la divulgation systématique des données. »
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En plus des entreprises qui minorisent, il y a ceux qui n’ont même pas communiqué le montant aux DOT. C’est le cas d’OM Métal ressources, de Shituru mining corporation et de la société de traitement du terril de Lubumbashi, STL.
Un autre problème est celui du paiement partiel de la DOT. Le paiement non intégral de la dot concerne 21 entreprises. Entre la dotation attendue et celle payée, il y a un écart de plus de 40 millions de dollars américains.

Des mécanismes
Cette situation nécessite la mise en place des mécanismes pour permettre aux entités de capter plus de dividendes. Pour Freddy Kasongo de l’Observatoire d’études et d’appui à la responsabilité sociétale et environnementale (OEARSE), cette situation est généralisée en ce qui concerne tous les revenus infranationaux. « On a l’impression que les entreprises payent bien aux plus forts. Et payent mal à ceux qui n’ont pas assez de levier sur la gouvernance du secteur ou qui n’ont pas assez de responsabilités juridiques ».
Ainsi, pour lui, il faut mettre en place certains mécanismes pour contrer ces pratiques frauduleuses. « Il faut une collaboration entre institutions au niveau national, provincial et des ETD pour que ces mécanismes soient connectés. » De plus, il propose aussi d’imposer des mécanismes de paiement de quotité unique et la répartition au niveau de la banque.
Il pense par ailleurs que le gouvernement doit user des nouvelles technologies pour contrer la fraude. « Peut-être que l’intelligence artificielle pourrait être utilisée pour superviser la numérisation des services gouvernementaux et la réduction de la manipulation des données dans le processus de production et même d’attribution des revenus afin d’atténuer le problème », a-t-il ajouté.
Toutefois, il faut aussi signaler la faiblesse du système fiscal en RDC. Car celui-ci est déclaratif , ce qui laisse l’opportunité à toute manipulation , dont la minoration du chiffre d’affaires.