AMI: la RDC appelée à repenser sa politique sur les minerais stratégiques
Lors du premier panel à l’Alternance Mining Indaba qui a ouvert ses portes ce 29 octobre à Lubumbashi, les experts congolais du secteur minier ont dressé un constat lucide. Si la République démocratique du Congo dispose d’une richesse minérale exceptionnelle, la politique nationale de gestion des minerais stratégiques reste encore inachevée et manque de cohérence.
Réunis autour du thème « État des politiques publiques et stratégiques sur les minerais stratégiques en RDC », les intervenants ont plaidé pour une approche globale et intersectorielle. Ceci afin que le pays tire un réel bénéfice de ses ressources naturelles.
Tout le secteur minier est stratégique?
Pour Simon Tumawaku, ancien ministre et aujourd’hui consultant, la RDC doit cesser de restreindre la notion de « minerais stratégiques » à quelques métaux comme le cobalt ou le germanium. « Tout le secteur minier est stratégique pour la RDC. Nous devons le considérer comme tel », a-t-il affirmé. Il a ainsi souligné la nécessité d’élargir la vision nationale à toutes les ressources, du cuivre au diamant, en passant par le coltan et le tantale.
Il a également appelé à un partenariat plus fort avec d’autres grands producteurs comme le Chili pour une meilleure maîtrise des prix sur le marché international.
Pour sa part, Maître Jimmy Munguriek, directeur de ressources Matters, a insisté sur la nécessité d’une stratégie nationale claire et cohérente. « Nous devons d’abord définir notre vision globale. Quels sont les minerais stratégiques, et pourquoi ? C’est cela qui déterminera nos choix politiques et économiques », a-t-il déclaré.
Il a salué les efforts récents d’ouverture de la RDC vers d’autres partenaires. C’est notamment les États-Unis et l’Union européenne après une longue dépendance vis-à-vis de la Chine. Il souligne par ailleurs que cet équilibre géopolitique est crucial pour la souveraineté minière du pays.
La société civile plaide pour une politique pragmatique.
Intervenant à son tour, Madame Alphonsine Tshilefe, représentante de la société civile, a reconnu l’existence d’une politique minière en RDC, mais en a dénoncé le manque d’efficacité sur le terrain. « Nous avons des textes, des codes et des directions, mais sur le terrain, la population ne ressent pas les effets de ces politiques. Nous devons revoir nos stratégies et adapter nos lois à la réalité », a-t-elle insisté.
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Elle a rappelé que plus de cinq ans après la révision du Code minier de 2018, la RDC peine toujours à transformer ses richesses en véritable levier de développement local. « La population vit sur un sol riche, mais dans la pauvreté. Il faut une vision minière claire, planifiée et mesurable.
Le CTCPM reconnaît les limites et promet des ajustements.
Clôturant les échanges, le représentant de la Cellule technique de coordination et de planification minière (CTCPM) a confirmé que la politique minière congolaise existe, mais qu’elle doit être actualisée et mieux articulée avec les autres politiques sectorielles. « Notre politique est fondée sur plusieurs textes, dont la Constitution et le Code minier. Mais nous devons renforcer la cohérence d’ensemble pour que ces textes produisent enfin des effets concrets », a-t-il admis.
Cependant le représentant du ministre des Mines Franck Fwamba a rassuré sur cette question. « Le gouvernement travaille pour mettre en place une politique globale sur la pôle sur les minerais stratégiques ». Il a par ailleurs expliqué que le gouvernement a mit toutes les batteries en marche pour que le pays se dote de la politique avant la fin de l’année.
De ce panel, un message clair se dégage. La RDC doit élargir la définition de ses minerais stratégiques, clarifier sa vision, et renforcer la coordination interinstitutionnelle pour transformer son potentiel minier en moteur de développement national. L’Alternance Mining Indaba se poursuit à Lubumbashi jusqu’au 31 octobre, avec d’autres panels axés sur la transformation locale, la gouvernance minière et la transition énergétique.

