Goma: Des déplacés du volcan innovent pour survivre
Des femmes déplacées suite à l’éruption volcanique de 2021 à Goma sont sans assistance. Elles ont quitté leurs maisons dans des villages voisins du volcan de Nyiragongo et ont trouvé refuge au quartier Mabanga 2 au centre de Goma. Et pour assurer la survie de leurs familles, ces femmes frabriquent des combustibles appelés localement Bibule.
Au quartier Mabanga 2 dans la ville de Goma au Nord Kivu, une trentaine de ménages vivent sous des cases en bache de couleur blanche. Il est heure locale, quelques-unes sont déjà parties marché. D’autres, par contre, sont là, chacune devant sa case, et s’adonnent aux travaux menagers. Sous un parasol colloré, Marie Kaswera, une femme de 65 ans, est assise sur un morceau de bois. À côté d’elle, il y a un bassin rempli de la poussière de charbon du bois un peu mouillé. Avec cette patte toute noire, elle frabrique des combustibles appelés Bibule.
»Depuis que nous sommes arrivées ici, nous n’avons jamais reçu d’assistance humanitaire. Ainsi, les autres femmes déplacées se sont mises à se plaindre, car elles ne savaient pas comment nourrir leurs familles, raconte-t-elle. « Je leur ai dit : arrêtez de vous plaindre. Je peux vous apprendre à fabriquer les Bibules. Ainsi, vous aurez non seulement les moyens pour cuisiner, mais aussi,ils constituent une source de revenu, explique-t-elle. Toutes les femmes déplacées ont adhéré à cette initiative.
Un recyclage
Et pour fabriquer les Bibules, ces femmes font le recyclage de deux produits locaux. D’abord de la poussière du charbon de bois , ensuite des résidus liquides de l’alcool frélaté, le Lutuku. Et le processus est assez simple, explique Madame Marie Kaswera.
Je prends un bassin de la poussière du charbon de bois. J’y ajoute un bidon de résidus liquides de l’alcool. Ensuite, je mélange pour obtenir une patte. Et puis, je prends la patte par petite quantité que je roule entre mes mains jusqu’à obtenir une boule, qu’on appelle Bibule.
La fabrication peut prendre des heures. Elle est suivie du séchage. »Les boules doivent sécher au soleil pendant au moins une semaine. Et puis, on les utilise comme combustibles à la place du charbon de bois », explique encore cette dame. Néanmoins, à cette étape, les femmes font face aux intempéries. De ce fait, l’ONG CEF-JDD, une organisation nationale, est venue en aide à ces femmes avec un lot de baches. Serges Kasungu, chargé de projet, affirme que cette assistance est importante pour les bénéficiaires. « Si nous avons des femmes qui peuvent se prendre en charge avec tout simplement un petit appui de notre part, c’est une réussite.
Lire aussi : https://magazinelaguardia.info/2023/07/24/lubumbashi-les-femmes-conscientes-de-leur-autonomisation/
Autonomisation
Les Bibules ne sont pas seulement utilisés par les femmes qui les fabriquent, explique de son côté Marie Kahambu, une autre déplacée. Les femmes ont commencé à les commercialiser, soit en gros ou encore en détails.
» Nous achetons un bassin de la poussière du charbon de bois à 2.500 Fr. Le bodon de 20 litres de liquide coute 1.000 Fr. Plus nous en produisons, plus nous avons des clients, déclare Marie Kahuambu. Et d’ajouter, le revenu me permet maintenant d’acheter un bidon d’eau, du savon et le reste, je le consacre à la scolarité de mes enfants.
Entre-temps, les acheteurs viennent sur place dans ce camp de fortune pour s’approvisionner. C’est le cas de cette dame qui arrive au moment où nous discutons avec ces femmes. Elle préfère les Bibules au charbon de bois. » Je viens acheter pour la cuisson à la maison. Les bibules sont plus économiques et coutent moins cher. Si j’achète pour 500 Fr, je vais cuire le haricot alors qu’avec le charbon de 1.000 Fr, ce ne sera pas prêt, témoigne-t-elle.
Même l’usage des Bibules n’est pas encore très répandu dans la ville de Goma, mais avec cette innovation, les femmes déplacées de l’éruption volcanique assurent leur survie.