RDC: honoraires des avocats: un casse-tête pour les justiciables ?

RDC: honoraires des avocats: un casse-tête pour les justiciables ?

 

Le métier d’avocat constitue un pilier important de la justice et du droit. Mais ce pilier est parfois plus pesant pour les justiciables. En RDC, par exemple, des personnes affirment avoir abandonné leur dossier à cause des honoraires que réclament les avocats. Ces honoraires sont devenus un casse-tête pour les justiciables. Pour la plupart d’entre eux les montants qu’exigent les avocats est exorbitant par rapport à leurs bourses.

À Lubumbashi, des témoignages abondent. C’est le cas de madame Marie, une habitante du quartier Golf Plateau et mère de 5 enfants. En 2016, alors qu’elle venait de divorcer d’avec son mari. La pauvre s’était rendue en justice dans une affaire de vente de sa maison par son mari après l’avoir répudiée pour épouser une autre femme qu’il avait installée sous le même toit conjugal situé au quartier Hewa Bora dans la commune annexe. Madame Marie engagera un avocat qui entreprendra les démarches auprès des instances judiciaires. Elle affirme avoir payé les honoraires à son avocat.

Dans le cours du traitement du dossier, elle s’était rendue compte à un moment que le dossier ne pouvait pas avancer jusqu’au jour où elle croisera son mari dans le couloir du cabinet de son avocat. « Face à mon mari qui avait beaucoup d’argent et moi qui n’avait rien et comme j’avais du mal à payer les honoraires, c’était facile que mon avocat bascule du côté de mon mari ». « Parce que tout le monde était dans sa poche. » Au bout du compte, l’infortunée a fini par abandonner son dossier en cours.

Un autre cas est celui d’un monsieur qui a recueilli l’anonymat. Il était poursuivi pour l’infraction de rébellion. L’affaire étant arrivée au tribunal il avait été libéré en appel grâce à son avocat. À la fin du procès, son conseil lui tend la note des honoraires ; le justiciable estimera quant à lui la somme était exorbitante. Il demandera à son avocat de revoir le montant : « J’ai la volonté d’honorer mais je suis incapable ». Vu le travail abattu, le conseil resta catégorique. Le courant n’allait plus entre les deux ; Pour dénouer la situation, l’affaire était soumise au corps des défenseurs judiciaires.

Quid des honoraires?

Pour certains Lushois interrogés à ce sujet, les avocats exigent trop de leurs clients. Pour Maître Émile MUSUNGAYI membre de la chambre de surveillance des défenseurs judiciaires, les honoraires sont devenus un casse-tête pour les justiciables parce que certains conseils ne savent pas traiter avec leurs clients en amont pour leur dire ce qu’ils doivent payer. Le client est surpris en aval. Mais si tout est fixé en avance et que le client accepte toutes les conditions posées par son conseil « je crois qu’il n’y aura pas des problèmes » déclare maître Émile. Et d’ajouter qu’une fois entendu, on dressera ce qu’on appelle la convention des honoraires qui peut être honorée en entier ou en partie selon les moyens financiers du justiciable. Il a en plus ajouté que la crise de confiance de la part du client envers son conseil et le coût de la vie face aux tarifications des honoraires par le barème peuvent conduire à l’abandon des dossiers.

Et pourtant, la question des honoraires est réglée par le législateur. Car il y a un barème établit dans la décision N°CNO/6Bis/88 du 11juillet 1988 portant barème des honoraires applicables par les avocats exerçant au Congo tel que modifié par la décision N°CNO/04/90 du 22 décembre 1990. Partant de la visite, la consultation, la vacation l’ouverture du dossier et autres sont fixés par la loi.

Par exemple, à l’article 7 du barème des honoraires, il est stipulé que pour le droit de visite, le montant ne peut être inférieur à 20 $ ni supérieur à 50 $. Pour l’ouverture du dossier le montant ne peut être inférieur à 50 $ ni supérieur à 100 $, la consultation orale minimum 50 $ maximum 100 $, consultation écrite sans recherche doctrine et jurisprudence minimum 300 $, maximum 1000 $, les honoraires en matière de conciliation verbale minimum 500 $ maximum 1000 $, conciliation écrite minimum 1000 $ maximum 10000 $ la liste n’est pas exhaustive.

Des honoraires exorbitants ?

Pour Maitre Musungayi, ce que les avocats exigent est légale. Pour sa part, Alphonse KIMBWISI avocat près la Cour d’Appel de Lubumbashi, la marge des honoraires commence de 20 à 30% et ils dépendent des revenus du client. Il arrive que l’avocat augmente les honoraires vu la qualité du travail abattu ; cela se fait par écrit et c’est discutable. Il arrive que l’avocat ne respecte pas la convention des honoraires, le client a le droit de porter plainte au barreau.

Il faut dire que selon le règlement intérieur qui organise la profession des avocats et selon l’ordonnance loi N°79/028 portant organisation du barreau, des défenseurs judiciaires et du corps de mandataires de l’Etat du septembre 1979 en ses articles 81 jusqu’à 85, les honoraires des avocats comprennent les frais dus à la postulation et les actes de procédure, les frais de consultation et de plaidoirie. Maître Alphonse souligne qu’il est interdit à un avocat de prendre en charge son client. Il est également interdit à un avocat d’être plaignant et défendeur, il y a relation entre avocat et avocat, mais pas avocat et client du parti adverse.

« Si les avocats sont accusés d’exagération des demandes de frais c’est par ignorance » Maître KIMBWISI explique qu’il y a ce qu’on appelle les provisions sur les honoraires. Elles sont considérées comme une avance sur les honoraires et ce sont des frais qui permettront à l’avocat d’acheter les unités, du carburant pour toutes les démarches. Mais si le client ne paie pas la provision avec quoi le conseil va-t-il effectuer les procédures? C’est comme ça qu’on voit l’avocat faire des demandes à tout moment et le client dit que les avocats exagèrent.

Me Basil a rappelé que les avocats ne sont pas des diables comme d’aucuns le pense, « tous ce que nous voulons est que les gens voient le travail que nous abattons sans oublier qu’il y a des avocats qui en font trop en demandant des sommes exorbitantes ». Il faut retenir que la tarification des frais de consultation par le barème tient compte de la notoriété de l’avocat, son ancienneté, sa spécialité, son efficacité ainsi que le risque ou les enjeux du dossier.

Des consultations gratuites pour les plus démunis

La loi congolaise prévoit pour les cas des personnes les plus démunies d’avoir des consultations gratuites. Celles-ci doivent s’adresser par écrit au bâtonnier qui confiera son dossier au bureau de consultation gratuite. « Par moment, il y a des gens que nous assistons gratuitement sans aucun sou ». Confie Maître Alphonse KIMBWISI.

Il faut dire que si les honoraires sont devenus un casse-tête pour les clients, les justiciables pour certains, c’est surtout à cause du manque de communication alors que pour d’autre, c’est à cause du coût de la vie qui semble être très élevé.