Kolwezi : les rejets de COMMUS, source de conflits entre creuseurs

À Kolwezi, l’exploitation des rejets de l’entreprise minière COMMUS est à la base d’une vive tension au quartier Cinq Ans. Ce mardi, un groupe de jeunes de ce secteur a manifesté dans la rue pour revendiquer le contrôle exclusif de ces remblais. La police s’est interposée pour rétablir l’ordre. Cependant cette tension qui dure depuis mercredi dernier a fait 4 morts et les dégâts matériels sont importants selon les ONG locales.
Ce mardi matin, les habitants du quartier Cinq Ans ont été en effet réveillés par la révolte des jeunes du même quartier. Ils ont barricadé le boulevard Joseph Kabila, empêchant ainsi l’accès au centre-ville de Kolwezi. De plus, ces jeunes ont vandalisé des boutiques et caillassé quelques véhicules des particuliers. « Jusque vers 12 heures locales, les activités commerciales ainsi que le transport sont restés paralysés« , témoigne Me Lambert Memba, président de la nouvelle société civile à Kolwezi.
La police qui est intervenue pour rétablir l’ordre, a tiré à balle réelle, dénonce la société civile. « On déplore un mort, c’est un jeune d’une vingtaine d’années. Les autres manifestants ont récupéré le corps et veulent le présenter auprès des autorités locales, indique encore maitre Lambert.
Les rejets de la discorde
Cette tension dure depuis plus de six jours. En effet, deux camps des creuseurs artisanaux se sont affrontés à Kolwezi. D’une part les creuseurs de Tshipuki et d’autre part ceux du quartier Cinq Ans. Les deux groupes se disputent l’exploitation des rejets miniers que l’entreprise COMMUS déverse au quartier Tshabula.
Ces rejets de la société COMMUS contiennent du cuivre que les creuseurs artisanaux récupèrent . Ensuite, ils vont vendre dans les comptoirs d’achat installés dans leurs quartiers. Cette activité constitue pour eux une source de revenu car les creuseurs n’ont pas de zone d’exploitation viable. Puisque les remblais des rejets sont situés dans le quartier Tshabula, qui est à proximité des quartiers Musonoie et Tshipuki, trois groupes de mineurs se sont emparés de leur exploitation. Ils estiment encore que ceux qui résident au quartier Cinq Ans, loin du centre commercial de Kolwezi, n’ont pas le droit d’y accéder.
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L’arbre qui cache la forêt
Le duel de cette semaine entre ces creuseurs n’est pas le premier. C’est une situation récurrente, indiquent les creuseurs artisanaux. « Souvent il y a des disputes entre les deux camps pendant que nous trions les rejets. Mais ceux qui entretiennent les conflits entre nous, ce sont les négociants et c’est pour leurs intérêts », s‘indigne Patient, un mineur. « Deux négociants qui achètent les minerais auprès de ces groupes de creuseurs sont en concurrence. Ainsi , chacun cherche toujours à opposer son camp à l’autre » a-t-il ajouté.
Déjà le weekend, un jeune creuseur du quartier Cinq Ans a été abattu par le camp des quartiers Tshipuki et Kanina. Le négociant de ce groupe avait acheté et distribué les machettes pour se venger sur le camp adverse.
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Ainsi le vendredi matin, les creuseurs du quartier Cinq Ans ont attaqué ceux du quartier Tshipuki. Et l’affrontement a eu lieu au niveau du pont golf près du tunnel de la société COMMUS.
Quatre morts et dégâts matériels
Ce conflits ont causé des dommages tant sur le plan humain que matériel. Selon des creuseurs, des blessés graves ont été enregistrés, dont l’un d’eux a eu son bras amputé par une machette. Cependant, l’ONG de défense des droits humains, IBDGH, évoque un bilan de 4 morts parmi les creuseurs. « Un nouveau creuseur a trouvé la mort ce 21 octobre, portant ainsi à quatre, le nombre de vies perdues depuis le début des hostilités. »
Plusieurs véhicules ont été caillassés, des pneus brûlés sur la route. Des alimentations et des terrasses ont été pillées, tout comme certaines maisons situées près de la route. En outre, l’avenue Joseph Kabila, la seule route asphaltée de cette partie de la ville de Kolwezi, est coupée. Les élèves n’ont pas étudié, les activités commerciales n’ont pas non plus fonctionné. « C’est la loi de la jungle ici. Les autorités doivent être regardantes, ça ne va pas ici. Nous avons passé trois jours sans sortir de nos maisons », se plaint monsieur Nyange, un habitant du quartier sorti pour constater les dégâts.
Par ailleurs, un véhicule d’intervention de la police a été confisqué et utilisé par les creuseurs. La police était donc incapable de mettre fin à l’affrontement de ce weekend. Ainsi la Garde républicaine (GR) a été appelée en renfort et la tension était tombée après des tirs de sommation.
Pour le sixième jour consécutif, les activités sont paralysées aux quartiers Cinq Ans, Kanina et Tshipuki dans la ville de Kolwezi. La nouvelle société civile appelle les élus locaux à dialoguer avec ces jeunes afin de trouver un consensus. Pour sa part, l’ONG IBGDH déplore une implication insuffisante des autorités locales de Kolwezi.